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Paul Personne : Dr Rock et Mr blues

Après le succès de son dernier cd "Patchwork électrique" et la tournée du même nom fin 2000, Paul remonte le temps et évoque pour Mcity les sources de ses inspirations et de ses aspirations. Propos recueillis et filmés par Mike Lécuyer lors du Festival Blues sur Seine (novembre 2000).

– Alors Paul Personne… Blues ou Rock 'n' Roll ?

– Oh les deux à la fois. Je crois que c’est vraiment mes deux grandes influences avec tout ce qu’il y a autour du blues et du rock 'n' roll. Le blues c’est le côté jazzy et rhythm 'n' blues; quand j’ai découvert le blues c’est parti de John Mayall, d’Eric Clapton, de Peter Green, toute la période blues boom anglaise. Après j’ai découvert que cette musique venait des Noirs américains et alors là tu tombes sur les trois King : Freddy, B. B. et Albert. Et puis tu remontes la filière, tu arrives à T.Bone Walker et tu comprends que Chuck Berry l’a pas mal écouté et tu remontes encore jusqu’à Robert Johnson, Fred Mac Dowell, tout le blues acoustique, Muddy Waters et tout ça. Tout le côté rock 'n' roll c’est Chuck Berry, Little Richard, et puis Jerry Lee Lewis le côté blanc. Je pouvais aussi bien écouter Howlin' Wolf ou Muddy Waters et en même temps écouter Hank Williams qui était une sorte de blues man de la country. Il y avait vraiment les deux mondes qui se sont mélangés, Noirs, Blancs. Quand j’étais môme j’écoutais les Beatles et les Stones et je ne savais pas que les Stones étaient vraiment influencés par Muddy Waters, Chuck Berry et que les Beatles étaient plus influencés par Jerry Lee Lewis ou Buddy Holly, les rockers blancs. J’ai toujours aimé les mélanges de plein de sortes de musiques, je n’ai jamais été un puriste…

– Et du côté français…?

– Ah j’ai souvent dit que mon premier rock 'n' roll c’était Johnny Hallyday et Eddy Mitchell avec les Chaussettes Noires. J’avais11-12 ans, c’était mon premier grand flash quand j’ai vu Johnny se rouler par terre avec son fute en cuir, sa chemise en dentelle et sa gratte en chantant "Laisse les filles". J’ai fait… Ouah, OK, ça ça me botte ! Faut dire qu’à la radio à cette époque là, et ce n’est pas une critique, c’était plutôt les Compagnons de la Chanson, Dalida, ce que l’on entendait peut-être de plus rock c’était Paul Anka qui chantait "Diana". C'est vrai que quand JoJo est arrivé ou Eddy avec les Chaussettes ça remuait un peu et j’ai senti que c’était par-là que ça allait se passer.

– Tu as commencé par la batterie…

– C’est marrant parce que… je pense qu’au départ j’avais envie de jouer de la guitare. Je m’étais fait une guitare en carton avec un manche en bois, des élastiques. Ça tenait avec des clous et je faisais le con sur mes 45 tours de twist de l’époque en faisant comme eux, en me roulant par terre. Et un jour ma frangine qui était musicienne, qui jouait très très bien de l’accordéon, a amené un batteur à la maison, et avec mes yeux de gosse, cette batterie jaune pailletée ça m’a impressionné et puis tu vois, le bruit que ça faisait et tout… Et donc j’ai commencé à piquer des aiguilles à tricoter à ma mère, une boîte à gâteaux, une louche et puis à m’entraîner sur mes disques, mes 45 tours et j’ai tout de suite eu le sens du rythme, j’avais tout de suite un truc. Donc au bout d’un an ma frangine m’a acheté une caisse claire, un cymbale et j’ai commencé à m’amuser avec ça puis après c’est la rencontre, les groupes de lycée "Salut toi qu’est-ce que tu fais ? ah tiens t’aime ça, t’aime tel genre de musique et tout ça quoi…" Et puis après tu commences à répéter dans des caves, des garages… Puis comme j’avais commencé la batterie je me suis retrouvé à être batteur pendant une dizaine d’années. Mais c’est un instrument qui m’a vraiment botté, qui m’a servi par la suite; c’est bien puisque tu as un sens du tempo, ça te fait comprendre les choses. Après quand tu joues avec un batteur, tu peux jouer avec lui parce que tu sais où il va … et donc c’est vachement intéressant. Mais après je me suis retrouvé parallèlement pendant que j’étais batteur avec une gratte … Il y a un mec qui m’avait prêté une gratte très très dure à jouer mais ça me suffisait pour trouver les accords des chansons des Beatles, des Stones, des Kinks, des Animals... Mon instrument principal était la batterie mais je gratouillais et dès que j’ai entendu Hendrix, dès que j’ai entendu Clapton, John Mayall, tous ces guitaristes qui me touchaient vraiment, j’ai fait "Hum, je crois que c’est plus ça que j’ai envie ". Et tout doucement j’ai délaissé la batterie, je suis allé en Angleterre m’acheter une gratte d’occas' et puis c’est parti quoi.

– Et puis pour chanter, c'est quand même plus facile avec une guitare qu'avec une batterie !

– Ouais c’est vrai, la batterie j’avais l’habitude hein. C’est pas évident, disons que c’est assez épuisant quoi parce que c’est vrai que la batterie c’est un instrument physique et j’ai jamais été un grand sportif. Mais ça allait quand tu es môme tu as ce qu’il faut et en plus tu es derrière et à cette époque là les sonos ça n’était pas ce qu’on a maintenant. Tu n’avais quasiment pas de retour de scène, tu entendais ta voix qui se barrait là-bas tu vois . C’était vachement dur et c’est vrai que la guitare c’est plus mélodique, c’est un instrument mélodique donc c’est un instrument qui va bien avec la voix. Puis ça m’a "botté" ce côté-là parce que quand tu es batteur tu casses les oreilles à tout le monde! Quand tu dois jouer donc tu tapes sur tes genoux… tu as la fourchette, le couteau quand tu es môme et tu as tes parents qui te font "tu arrêtes un peu!". Bon une gratte même si c’est une gratte électrique, d’autant plus, tu peux être dans ta piaule, tu ne fais pas de bruit si tu n’as pas d’ampli mais tu peux jouer tu peux faire quelque chose, batteur tu es vraiment frustré quoi.

– Tu chantes "A bientôt", "Plus loin d'ici", "Bouge d'ici", etc. C’est mieux ailleurs ?

– C’est le point d’interrogation, c’est l’aventure, c’est l’espoir, c’est le rêve. Il y a des tas de thèmes c’est vrai où je suis assez obsédé par la route, que ce soit le "Rêve sidéral d’un naïf idéal", que ce soit "Je roule" dans le dernier album ou des tas de trucs comme ça. J’ai fait ça quand j’étais môme, l’ambiance environnante s’y prêtait vachement. Quand tu as lu Kérouac, Dante, des tas de mecs comme ça, tu vois, tu es déjà bercé par ce genre de trucs et les années 60 se prêtaient vachement à ça, à partir avec un sac sur le dos, à aller faire du stop et puis tu dormais où tu pouvais, sur une plage, dans un champ. Quand tout se passait bien tu avais quelqu’un qui t’hébergeait et j’ai vachement aimé ce côté là... on the road. Et c’est vachement bien, j’ai trouvé en plus avec la musique le moyen d’être sur la route et de faire quelque chose qui me plaît, de ne pas être juste un "hobo", pas juste être un vagabond et donc j’ai allié les deux. Mais c’est vrai que ce truc "Y’a peut-être un meilleur autre part" oui c’est utopique, ça fait partie d’une forme de naïveté que j’ai gardée. Même si la vie s’est chargée de rabattre mon caquet mais disons que j’ai toujours gardé quelque chose de vachement adolescent en moi et toujours une forme d’espoir. Je pense qu’il n’y a pas le choix, tu ne peux pas être complètement désespéré... parce que, au bout du compte, tu finis par t’en coller une. Donc si tu veux garder l’espoir, garder quelque chose pour les générations futures, pour espérer qu’il peut y avoir quelque chose de mieux, tu te dis tiens c’est peut-être devant que ça se passe. Le passé tu le connais, le présent tu es en train de le vivre. Devant… tu espères peut-être que…

– Préfères-tu la scène ou le studio ?

– Je pense que… pas tout le monde mais il y a peut-être pas mal d’artistes, de musiciens qui peuvent te dire... c’est complémentaire. C’est ce que je pense aussi, vu ma personnalité un peu introvertie, timide et tout ça. C’est vrai que je suis à l’aise chez moi quand je trouve des chansons par hasard, quand j’écris des trucs. Arriver en studio et essayer de concrétiser ce que tu as dans la tête c’est vachement agréable, tu n’as pas le trac en studio, tu peux recommencer autant de fois que tu veux, tu essayes de trouver le bon son au bon moment, le bon feeling. La scène c’est "one shot", tu ne sais pas si tu vas être à la hauteur de ce qu’attendent les gens, si tu auras l’énergie ce soir là pour leur donner ce qu ’il faut, parce que il faut arriver en tournée à gérer la fatigue. Et quand tu joues 6 jours sur 7 il y a des moments où tu es vraiment "naz". Mais c’est une sensation unique, tu ne sais pas quel va être le bon concert. Là aussi c’est un grand point d’interrogation, est-ce que le son sur scène va être bon, est-ce que le son dans la salle va être bon… Mais c’est un autre truc, la vie sur la route ça fait partie de la vie d’un musicien...

– Et les nouveaux médias ! As-tu un ordinateur ? Est-ce que tu surfes sur internet ?

– Non je ne surfe ni sur Internet ni sur la mer parce que je nage très mal, mais je sais que ça existe, j’ai des tas de potes qui l’ont et c’est un chouette "instrument" si tu en ressens le besoin. Moi pour le moment, sans être complètement préhistorique, je n’ai jamais été trop branché ordinateur, c’est-à-dire passer mon temps devant un clavier ou ce genre de chose, déjà que je ne regarde pas trop la télé, donc pour le moment je n’utilise pas vraiment. Mais il y a mes potes qui me montrent comment ça se passe et je trouve cela assez génial. Il faut que j’en ressente le besoin pour l’utiliser, le jour où je sentirai que j’en ai vraiment besoin je me ferai "tomber" Internet et puis voilà...
Mike Lécuyer

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